JN01058 Gueule de bois et son remède
Dimanche 1er juillet 2001
Lorsque j’émerge, il est 10h15. Au fur et à mesure que mes sens et mon esprit sortent de l’engourdissement du sommeil, je retrouve les souvenirs de la nuit d’avant. Je repense à la conversation avec Thibault, au départ prochain de ce connard de Jérém. Je me revois en train de chuchoter des mots bien chauds à l’oreille de mon bel étalon. Et je me revois me faire humilier par ce même gars à qui j’avais voulu faire plaisir. Je le revois se moquer de mon envie de lui, je le revoir repartir avec cette pouffe.
Je suis tellement mal que je n’ai vraiment pas envie de quitter les draps.
Quelle va être la suite des événements ? Vais-je revoir Jérém ? Comment le retrouver après ce qui vient de se passer ? Ai-je seulement envie de le retrouver ?
De toute façon, que ce soit maintenant ou dans deux mois, notre histoire est condamnée.
Heureusement, ma cousine m’a indiqué une issue de secours : « T’aurais pas par hasard un rendez-vous en attente avec un gentil garçon ? »
Là, pour le coup, j’ai vraiment envie de le revoir.
J’attrape mon portable sur la table de nuit, et je lui envoie un SMS :
Salut, ça va ? Tu es libre ce dimanche ?
Quelques instants plus tard, le couinement de mon portable m’annonce l’arrivée d’un nouveau message.
Salut, oui, je suis libre. Tu peux passer si ça te dit
Et quelques secondes plus tard,
Et comment !
est ma réponse enjouée.
😉 14h chez moi ?
Parfait. Merci. A tout !
Ce matin, j’ai enfin quelque chose de positif auquel m’accrocher, un rayon de soleil capable de chasser de façon durable la chape de nuages jusqu’à là amoncelés dans mon ciel intérieur.
La perspective de revoir Stéphane m’apaise, me rend tout guilleret. Mon esprit est tellement occupé à imaginer ce bonheur proche que j’arrive presque à arrêter de penser à la déception de cette nuit, à cette cuisante humiliation.
Je me lève, je prends ma douche, je descends prendre un café et je remonte brancher mon casque pour écouter à fond les treize titres de pur bonheur que composent l’album Ray of light. Je monte le son à fond, tout en surfant sur Internet à la recherche de photos et de commentaires sur les dernières dates du Drowned World Tour. Le 12 juillet, date du concert à Londres, approche et je m’impatiente.
Assis devant mon ordi, je suis partagé entre deux envies, comme chaque fois que je suis dans l’attente de découvrir quelque chose que je pressens être spécial, un livre, un film, un événement, ou la rencontre de cet après-midi avec Stéphane.
L’attente est tellement délicieuse, que j’ai envie de la voir s’étirer à l’infini. Ce qui cohabite par ailleurs avec mon impatience de la découverte. Hélas dans le cas d’un concert je n’ai pas le pouvoir de faire durer l’attente.
Les titres « To have and not to hold », « Little star » et « Mer Girl » s’enchaînent pour mon plus grand bonheur.
Après m’avoir visiblement appelé plusieurs fois en vain, et ce à cause du volume complètement délirant de mon casque, ma mère fait irruption dans ma chambre pour m’annoncer que le déjeuner est servi.
Un grand saladier rempli de spaghettis à la sauce tomate trône au milieu de la table. Je mange en vitesse. Et, tout en jonglant parmi les questions typiques du dimanche midi : « T’es rentré à quelle heure ? Vous étiez où ? T’as bu ? » j’arrive à placer l’info qui me tient à cœur, à savoir que cet après-midi même je vais sortir à nouveau, pour « aller voir Dimitri ». Ce qui entraîne des réflexions et des reproches de la part de mon père au sujet de mes sorties excessives.
Il me saoule, mais je me fous un peu de ses remontrances. Oui, depuis quelque temps, je sors beaucoup. Moi qui jusque-là ne sortait pratiquement pas. Mais en même temps j’ai le droit de profiter un peu, le bac est passé.
Une demi-heure plus tard, je suis de retour dans ma chambre. Je m’allonge sur le lit et j’essaie de respirer à fond pour me calmer. L’heure du rendez-vous avec Stéphane approche et j’ai du mal à imaginer comment vont se passer ces retrouvailles. J’ai envie de passer un bon moment, j’ai envie d’oublier ce qui s’est passé la veille avec ce connard de Jérém. Je veux en savoir un peu plus sur ce charmant garçon au labrador.
A 13h30, je marche dans la rue en direction du quartier de la Halle aux Grains.
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