JN01043 Bac, dernier jour : la Biologie (et celle des sentiments aussi)
Le lendemain, vendredi, je me réveille à 7 heures du mat. Je suis fatigué, et d’humeur plutôt maussade. Heureusement, la matinée est libre. Le bac bio c’est l’après-midi.
Je traîne au lit, je repense à Jérém, je le revois en train de me baiser la bouche, la veille, dans les chiottes du lycée. Je bande, je me branle.
Je pense au fait qu’aujourd’hui c’est le dernier jour du bac, et que c’est probablement la toute dernière fois que je vais voir Jérém. J’ai envie de pleurer, je pleure, je me rendors.
Le radio-réveil affiche 11h08 lorsque je rouvre les yeux. Et là, ça va mieux, je me sens bien mieux reposé. Je m’étire longuement et j’ai l’impression de revivre. Je me douche et je descends manger. Je discute avec maman, j’ai davantage envie de parler que la veille. La fatigue amplifie les soucis, alors que le repos nous donne les ressources nécessaires pour les affronter.
L’heure avance vite. A une heure, je suis prêt à partir.
A une heure trente je suis devant le lycée. Il fait chaud dehors, je rentre dans le hall. Une fois n’est pas coutume, Jérém est déjà là, assis sur les marches de l’escalier conduisant au premier étage, en train de discuter avec des potes. Et il est juste à tomber.
Un putain de débardeur chocolat à bretelles épaisses et à fines rayures enveloppe sa plastique de fou, redessine chaque ligne de son torse, et en particulier le relief des pecs. Je suis déjà KO, sans même avoir croisé son regard.
Dans le hall, je retrouve des camarades, je me force à discuter avec pour me distraire, pour essayer d’oublier Jérém. Mais pas pour longtemps.
Dans la salle d’examen, Jérém prend sa place à deux tables de moi.
J’ai envie de me lever et de lui sauter dessus. J’ai envie de lui mettre des baffes. Il m’attire. Il m’énerve. Allez, Nico, prends sur toi un dernier coup. Ce soir, tout sera fini pour de bon. C’est à la fois un immense gâchis et un grand soulagement. Loin des yeux, loin du cœur. A partir de demain, je vais pouvoir l’oublier. Enfin, je crois.
Le chrono démarre. Je me penche sur la copie. 14h30, je gratte du papier. 15h00, je gratte toujours du papier. 15h15, je lève les yeux, Jérém semble concentré sur sa copie. Je reste un moment à le regarder, tout en essayant de le détester. La colère est la seule parade que j’ai trouvée pour ne pas me laisser aller à la profonde tristesse qui me guette à chaque instant. Car dans moins de trois heures, Jérém sera mon passé.
Je me replonge dans ma copie, en essayant de retenir les larmes qui me montent aux yeux. J’ai beau essayer, il y en a quand même une qui arrive à tomber sur la feuille. Je l’étale avec mon doigt, pour limiter les dégâts.
16h00, je commence sérieusement à en avoir marre, mais je gratte toujours du papier.
Je lève une nouvelle fois les yeux de ma copie, je regarde mon Jérém. Je suis assommé par l’harmonie parfaite entre la couleur chocolat de son débardeur et le teint mat de sa peau. J’ai tellement envie de lui.
Je regarde la pendule, il ne reste plus qu’une heure : allez Nico, tiens bon.
16h20, je relis ma copie, je fais quelques corrections.
C’est 16h40 lorsque j’entends du remue-ménage venant de la direction de mon Jérém. Je lève les yeux et je vois mon bobrun ramasser ses affaires, quitter son banc et s’en aller déposer sa copie sur le bureau.
Ainsi se termine notre « histoire » : sans aucune « solennité », sans un adieu, sans un au revoir, sans même un regard, comme une bobine qui serait tout simplement arrivée au bout.
J’ai tant redouté l’arrivée de l’examen de bio, le dernier examen. J’ai tant souffert du supplice de l’avoir sous les yeux pendant trois heures que j’en ai appelé de toutes mes forces pour que ce supplice prenne fin. Et maintenant qu’il ne me reste qu’une poignée de secondes pour admirer son incroyable sexytude, avant qu’elle ne disparaisse de ma vue et de ma vie à tout jamais, à cet instant précis, je regrette de ne pas pouvoir ralentir le temps, ou même l’arrêter.
Soudain, je me rends compte que je n’ai même pas une photo de lui pour me souvenir de son visage, de son corps. Je n’ai qu’une chemise pour me souvenir de sa présence olfactive.
Lorsque la porte de la salle d’examens se referme derrière lui, je suis saisi par une irrépressible envie de me lever et de lui courir après. Non, ça ne peut pas se terminer comme ça, c’est pas possible.
Tout comme vient de le faire Jérém, je range subitement mes affaires, je dépose ma copie sur le bureau et je me dirige vers la sortie de la classe.
Et tant pis si ça peut paraître louche, tant pis si je peux donner exactement l’impression de lui courir après. Après tout, c’est tout à fait le cas. De toute façon, le lycée, c’est fini, alors je n’en ai plus rien à foutre des ragots.
Je referme la porte derrière moi et je balaie fébrilement du regard le hall du lycée. Je ne sais pas ce que j’espère exactement, si c’est de le trouver là, en train de m’attendre ou bien au contraire, si j’espère qu’il soit parti, pour commencer de l’oublier.
Je me dis que je dois l’oublier, mais je ne veux pas l’oublier, je ne peux pas. Jérém est sorti de mon champ de vision depuis moins de cinq minutes et il me manque déjà, c’est horrible. Jérém, où es-tu ? J’ai tellement mal que je suis à deux doigts de crier son prénom pour essayer de le retrouver. J’avance d’un pas rapide, balayant l’horizon dans toutes les directions, alors qu’un énorme désespoir déchire mon esprit. L’idée de ne plus jamais le revoir est insupportable, j’ai envie de pleurer.
Et je pleure.
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