JN01011 Souvenir de Jérémie (fête foraine à Fenouillet)
(Moins d’un an avant « première révision »).
C’est à la soirée de fin d’année de première que j’ai fait la connaissance de Thibault.
D’après ce que j’ai pu comprendre, il joue dans la même équipe de rugby que Jérém. Et, surtout, Thibault est le meilleur pote de Jérém. C’est à ce titre qu’il a dû être convié à prendre part à cette soirée de fin d’année, même s’il n’est pas dans notre classe, ni dans notre lycée.
Thibault est un beau garçon aux cheveux châtains, un peu moins grand que Jérém mais plutôt du genre bien charpenté, un garçon très charmant et d’une gentillesse exquise.
Après le repas au resto, quelqu’un a lancé l’idée d’aller faire un tour à la fête à Fenouillet. A cette époque encore, les permis et les voitures ne sont pas nombreux dans notre classe. Pour des raisons d’âge, Jérém est motorisé, il dispose d’une 205 d’occasion rouge feu.
Thibault aussi dispose d’une voiture, ainsi que certains camarades.
Evidemment, je ne suis pas en voiture avec mon beau Jérém. « Tant mieux », j’ai envie de dire, ça aurait été trop dur d’être à côté de lui et de faire tapisserie.
Pour la fête locale, les forains ont mis le paquet, ça clignote et ça fait boom boom de partout.
Les mecs ont d’abord fait étape au punching-ball, ils se sont ensuite déplacés au stand de tir, pour échouer enfin à une buvette, sorte de riche vitrine de jeunes mâles en train de saouler la gueule, de déconner, de consolider leurs amitiés viriles.
A un moment de la soirée, je vois Jérém s’éloigner tout seul. Mais où est-ce qu’il va ce petit con ? Je ne vais pas tarder à être fixé.
Pendant son absence, j’entends des camarades parler d’une nana qui aurait flashé sur lui lors de l’étape au punching-ball.
Lorsque je réalise que le bogoss est parti tirer son coup avec une nana, j’ai soudain l’impression que mon ventre est le punching-ball et que la meute de jeunes mâles vient tout juste de se défouler dessus. L’idée qu’à cet instant précis, le gars qui me rend dingue est en train de se faire peloter ou sucer par une nana, m’est insupportable. J’ai envie de crier, j’ai envie de tout casser.
Le bogoss revient une demi-heure plus tard, la cigarette au bec, il revient vers ses potes, sa garde rapprochée, un petit sourire bien coquin illuminant son beau visage.
Jérémie est accueilli de la même façon qu’il a été salué tout à l’heure, affectueusement raillé par ses potes. Des mots comme « serial baiseur » ou « bite à tête chercheuse », lui sont lancés.
Sans ciller, le bobrun reprend sa place sur la chaise haute qu’il avait quittée une demi-heure plus tôt et qu’on lui a gardée.
Le regard fier et taquin, il redemande une bière, l’air plutôt fier d’entendre ses potes « célébrer » son exploit avec des moqueries transpirant un subtil mélange de jalousie et d’admiration.
Derrière son regard conquérant, il sait que ses potes n’attendent qu’une chose, l’entendre justement raconter son exploit.
La bière demandée atterrit enfin dans la main du bogoss. Il en boit une bonne rasade, avec ce geste très mec de porter le goulot direct à la bouche. Je suis happé par sa pomme d’Adam s’agitant nerveusement au rythme de sa déglutition.
Puis, le bogoss commence à parler, un petit sourire très coquin au coin des lèvres, l’air du mec plutôt fier de lui.
Je suis loin, trop loin, à l’opposé de la buvette, et la musique est trop assourdissante pour que je puisse entendre ce qu’il est en train de raconter à ses potes. Je donnerais pourtant une fortune pour pouvoir entendre son récit. Même si je sais que cela serait très dur à entendre pour moi.
Un camarade vient certainement de lui balancer un truc drôle. Jérém sourit, il ôte la cigarette des lèvres, l’air pressé de répliquer à la boutade de son pote. Et là, il a ce geste en apparence anodin, inconscient, mais que je trouve si « mec », le geste de se gratter la joue avec le pouce de la main qui tient la cigarette, tout en plissant les yeux. Putain, qu’est-ce que je le trouve sexy à cet instant précis !
Jérém vient à son tour de balancer un truc bien drôle ou bien salace, car je vois toute la clique rigoler.
Thibault pose son bras sur l’épaule de Jérém, le genre de geste de complicité virile entre mecs qui m’a toujours fasciné. Et, à fortiori, lorsque ça concerne mon bobrun. Thibault rigole, et avec son autre main, il semble indiquer quelque chose dans le cou de son pote. Un « quelque chose » que je ne tarde pas à identifier (avec horreur) comme étant une trace de rouge à lèvres.
Je sais que Jérém est un mec à nana, sa réputation dans ce domaine n’est plus à faire. Pourtant, mis devant l’évidence, je ne peux m’empêcher de crier intérieurement au gâchis monumental.
Oui, devant le fait de voir sa sexualité aussi clairement évoquée, je ressens une intense brûlure dans le ventre. Je me sens anéanti par la distance abyssale entre la violence de mon désir pour ce mec et son inaccessibilité totale. J’ai envie d’hurler ma déception, j’ai envie de crier la souffrance qui me ravage de l’intérieur.
Une heure plus tard, je rentre à Toulouse dans une autre voiture que celle de l’aller. Autour de moi ça discute, ça rigole. Mais moi, je n’ai pas du tout envie de rigoler.
Le périphérique défile sous mes yeux, et moi je reste seul dans mon coin, prétextant la fatigue et l’envie de dormir. La jalousie et la frustration me ravagent.
Soudain, je ressens en moi la violente envie de savoir, l’envie d’être un p’tit con comme Jérémie, ne serait-ce qu’une seule journée, l’envie d’avoir les atouts physiques, l’assurance, le charme, l’insolence, l’impertinence, le tout relevé d’une petite arrogance bien dosée. Je voudrais savoir décocher des sourires diaboliquement sexy, lancer des regards brûlants, maîtriser avec aisance et virtuosité le langage corporel et verbal du petit con. Je voudrais apprivoiser l’art du port du t-shirt moulant et de la casquette à l’envers, cet art qui fait d’un petit con un parfait petit con.
Oui, pendant une seule et unique petite journée, je voudrais pouvoir ressentir la grisante sensation de me savoir maté non-stop, de me savoir désiré de toute part. Je voudrai pouvoir me dire que ma virilité radioactive me permettrait de me taper à peu près qui je voudrais, quand je le voudrais, d’un claquement de doigts.
Oui, je voudrais au moins savoir, juste savoir, ce que ça fait d’avoir l’impression que le monde est à mes pieds, que tout m’est permis, ou presque, je voudrais vivre une journée dans la peau d’un petit con pour qui tout cela est tout simplement naturel, je voudrais jouir de cette insouciance, au sens propre comme au sens figuré.
Ah oui, pouvoir être un p’tit con comme Jérémie, ne serait-ce qu’une seule journée, je crois que ce serait un vœu que je ferais volontiers au Génie de la lampe.
Mais il y en un deuxième vœu que j’aimerais formuler, peut être encore plus fiévreusement que ce premier. C’est celui d’exister aux yeux d’un p’tit con comme Jérémie. Être son pote, déjà, pouvoir le côtoyer régulièrement, partager des moments avec lui, faire partie de sa vie, jouer au rugby avec lui, partager les vestiaires, les troisièmes mi-temps, savoir ce qu’il aime, devenir son complice, son confident. Faire partie de sa « meute ».Etre son meilleur pote, comme Thibault.
Thibault à qui, hélas, je n’ai pas eu l’occasion – je n’ai pas osé – adresser la parole de la soirée.
Troisième vœu, en plus de l’amitié – ou à la place, si le choix s’impose – avoir le cran de lui exprimer mon attirance, connaître le bonheur de le voir accepter cette attirance, sans réticences, en être flatté. Puis, s’amuser à flirter, se rapprocher doucement. Rien que le fait de ressentir le désir d’un p’tit con comme Jérémie, qu’est-ce que ça doit être fabuleux !
Et quand le p’tit con est prêt, je connaîtrai cet instant magique où il franchit la barrière, où il cède enfin à la tentation. Je serais celui qui l’amène à transgresser ses tabous, ses à priori, ses interdits, celui qui lui faire découvrir des envies qui sont déjà en lui mais qu’il n’a jamais osé assouvir. Je serais le premier à lui faire découvrir ce que c’est le plaisir entre garçons. Je le laisserais me posséder, me remplir de lui et de sa virilité. Je lui offrirais l’orgasme de sa vie, tout en lui laissant par ailleurs l’impression que c’est lui qui est aux commandes, qu’il est LE p’tit mâle, le seul. Je conforterais un peu plus son ego et sa fierté de petit macho.
Alors, est-ce que j’ai davantage envie d’être et de jouir comme Jérémie ou bien de faire jouir Jérémie ? Franchement, entre les deux, mon cœur balance…
Ce serait un bon sujet de philo du bac : vous avez 4h !!!!!
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