JN0208 Très chaud sous la couette, et petits mots sur l’oreiller
Campan, le samedi 8 septembre 2001, tard dans la soirée.
« Refais-moi ce truc que tu m’as fait une fois ».
« Quel truc ? ».
« Ce truc, tu sais ».
« Je t’ai fait tellement de trucs ».
« Ce truc-là était vraiment dingue ».
« Vas-y, raconte » je le cherche, alors que j’ai ma petite idée de ce « truc » dont il est question.
« Cette nuit-là, tu m’as sucé, tu m’as branlé, je ne sais combien de temps, tu me donnais envie de jouir, mais tu ne me laissais jamais venir ».
« Ah, oui, je vois, et alors, t’avais kiffé ? ».
« Ah, putain, que oui, je crois que jamais je n’ai joui aussi fort de ma vie, tu ne peux même pas imaginer à quel point j’ai kiffé ».
« Alors, tu vas kiffer deux fois plus ».
Allongé sur le dos, la queue raide et insolente, une étincelle lubrique dans le regard qui mettrait le feu au soleil lui-même, Jérém attend que je vienne lui offrir une nouvelle fois ce plaisir dont il se souvient, et qui l’a marqué. Qu’est-ce que c’est bon de l’entendre dire à quel point il avait kiffé ce « truc », peut-être le premier truc que je lui avais proposé, et avec lequel je l’avais surpris, après de nombreuses « révisions » où il avait mené le « jeu » de bout en bout ! Et quel bonheur de l’entendre en redemander !
Je ne peux attendre plus longtemps pour aller m’occuper de mon bomâle brun.
Je saisis son manche raide du bout des doigts, je l’enserre lentement, je le loge dans le creux de ma main. Ce simple, premier contact m’apporte un intense bonheur tactile, composé de multiples sensations : puissance, douceur, chaleur, virilité. Sa queue remplit parfaitement ma main refermée, comme si l’une était faite sur mesure pour l’autre, et vice-versa, comme si nos anatomies étaient prévues l’une pour l’autre.
Ma prise est assez relâchée, ma main coulisse lentement, elle excite autant qu’elle frustre : je caresse son manche, je cajole ses couilles, je titille son gland. Le bogoss frémit, il semble beaucoup apprécier.
Sans cesser de le branler, je me penche sur lui, je l’embrasse, sur la bouche d’abord, puis, mes lèvres descendent le long de sa mâchoire, de son cou, de ses pecs, de ses abdos, elles glissent le long du petit chemin de poils bruns qui amènent à son pubis. Je frissonne, il frissonne.
Je cesse alors de le branler, j’approche mon visage de ses bourses, que je renifle longuement, méthodiquement, dans chaque moindre recoin, je renifle sa queue tout aussi longuement, laissant le bout de mon nez traîner, effleurer, exciter : je remonte jusqu’à effleurer le frein, contact qui fait sursauter le bogoss, de surprise et de plaisir.
Voilà un long et délicieux voyage agrémenté d’une multitude de petites, délicieuse odeurs de mâle qui a déjà pas mal donné de sa puissance sexuelle, mais toujours débordant de testostérone : un mâle dont le torse ondule désormais sous l’effet d’une respiration excitée.
Encouragé par ses réactions, j’accomplis le même voyage, tout en provoquant des frissons encore plus intenses : sa respiration haletante cède peu à peu la place à de petits gémissements, et à des mots d’encouragements :
« Putain, Nico, tu me rends dingue ».
Je dois me faire violence pour ne pas céder à la tentation assommante de gober son gland gonflé à bloc et de provoquer au plus vite sa jouissance : la condition pour le faire jouir comme un malade, c’est de le frustrer, le pendant, c’est de me frustrer avec lui.
« Suce-moi » je l’entends chuchoter, sur un ton assez ferme. Ça ne rigole plus.
« Pas encore » je le cherche.
« J’ai trop envie ».
« Moi aussi ».
« Tu vas craquer, de toute façon » il me nargue.
« C’est toi qui vas craquer ».
« Jamais de la vie » fait-il, la voix déformée par l’excitation.
« Si au prochain tour je mets la langue, tu vas craquer ».
« Tu vas te jeter dessus avant ».
« Chiche ».
C’est au tour de ma langue de faire monter la pression chez le bobrun : elle s’emploie à lécher ses couilles, à chatouiller ses bourses, elle remonte sa queue lentement, tantôt en lâchant des petits coups rapides, tantôt en traînant, elle remonte jusqu’au frein, arrachant des frissons violents à ce petit Dieu à l’anatomie parfaite.
La queue brûlante, le gland gonflé à bloc, le bogoss se plie pourtant à l’interminable attente d’un plaisir sans cesse annoncé et sans cesse repoussé. Je sais qu’il me fait confiance, cependant, je sens que son impatience grandit de seconde en seconde. Ses inspirations et ses expirations sont longues, profondes, bruyantes, le bogoss monte en pression, il est chaud, bouillant.
A l’époque de nos premières révisions, à ce stade des opérations, il m’aurait déjà fourré la queue dans la bouche et il serait en train de la défoncer avec des coups de reins sauvages.
Mais là, il se retient, certes, il a un petit pari à gagner, mais il n’y a pas que ça. En fait, depuis nos retrouvailles, Jérém me fait l’amour tout en douceur, comme s’il avait peur de me manquer de respect en jouant au mâle domi qui était son rôle dans notre relation d’avant notre clash. J’adore le Jérém attentionné, adorable, mais je n’ai pas envie pour autant de laisser ce dernier effacer le jeune mâle bien sûr de lui, à la virilité insolente, le mec un brin arrogant, un tantinet macho, et infiniment, indiciblement craquant. Alors, ce Jérém « petit con », je vais aller le chercher là où il est, caché derrière la « peur » de ne pas être bien perçu.
Je continue de titiller son frein avec des petits coups de langue : Jérém vibre de toute part, il souffle comme un petit taureau.
Puis, à un moment, sans prévenir, ses abdos se contractent, son torse se relève, et sa main vient se poser lourdement sur mon cou. C’est à ce moment-là que je sens que je vais gagner mon « pari » : le mouvement est lent, mais ferme, à la fois doux et sans appel, Jérém m’oblige à gober son gland, puis, sa queue tout entière. Le bogoss a envie de se faire sucer, un point, c’est tout.
« Ah, c’est bon » je l’entends chuchoter, la voix éraillée par l’excitation, alors que son manche finit d’envahir mon palais.
Sa queue porte un délicieux petit goût de sperme qui me rappelle à quel point il est « le mâle », et à quel point ce mâle est puissant. Combien de fois a-t-il joui depuis ce matin ? Combien de fois m’a-t-il rempli de son jus ? Je ne m’en souviens même plus. Je nage dans un bonheur sensuel indescriptible.
Oui, finalement, c’est Jérém qui craque : et c’est tellement bon de sentir sa queue entre mes lèvres, dans ma bouche, avant même de commencer à le sucer. J’adore me sentir envahi par son manche, par son envie de mec, j’adore humer les odeurs qui se dégagent de sa peau, de ses poils pubiens, j’adore me retrouver nez à nez avec son mur d’abdos, avec ce petit chemin de poils qui part de son nombril et qui semble me rappeler, si besoin était, la marche à suivre.
« Allez, vas-y, suce » fait-il, tout en imprimant à ma tête le mouvement qu’il attend d’elle.
Il n’aura pas fallu chercher longtemps pour que le petit mâle en rut sorte de sa réserve. Et c’est un pur bonheur.
Alors je le suce longuement, lentement, tantôt en m’attardant avec ma langue autour du gland, en le chatouillant par des touches légères, tantôt en le laissant glisser soudainement au fond de ma gorge et en le gardant bien au chaud, pendant de longs moments.
J’amène son excitation à des sommets délirants, lui faisant sans cesse entrevoir la ligne d’arrivée de son orgasme, mais sans jamais le laisser l’approcher, je tiens sa jouissance en suspension entre mes mains, dans ma bouche, pendant très longtemps, je le rends dingue, à la fois de plaisir et de frustration, tout en essayant d’ignorer, avec de plus en plus de mal par ailleurs, cette brûlante, sauvage, insoutenable envie, qui est la mienne, de le laisser déverser dans ma bouche les longs traits chauds que je connais si bien, son jus de p’tit mec.
Le bogoss est moite de transpiration, vibrant de plaisir : jusqu’à quand vais-je pouvoir le tenir dans cet état d’attente et de frustration ? La réponse vient du principal intéressé. Ainsi, sans prévenir, le bogoss se dégage se moi, il descend du lit, il me lance :
« Viens me pomper ».
Jérém est debout à côté du lit, adossé au mur, son corps musclé et sa queue tendue n’attendent que moi, pour jouir. Un instant plus tard, je suis à genoux devant lui, en train de le pomper, ivre de la vision sublime de ce mâle qui me domine de toute sa taille, de toute sa puissance, de toute sa virilité, qui me regarde en train de lui offrir le plaisir qu’il exige, ivre de sa bonne gueule de mec et de son regard brun qui crient au sexe, de son menton et de sa mâchoire recouverts de barbe brune, ivre de ce torse tout en muscle et en jeunesse, ondulant au rythme de sa respiration excitée, ivre de ce corps légèrement penché en avant, de sa chaînette de mec cherchant l’aplomb entre deux petites oscillations, de son grain de beauté toujours aussi adorable et sexy, ivre de ses épaules et de son cou massif, de ses biceps rebondis, de ses tatouages sexy, de ses tétons à croquer, de cette profonde ligne médiane creusée dans le muscle saillant de ses pecs et de ses abdos de fou, ivre de cette pilosité brune qui me fait craquer, ivre de ce chemin de petits poils juste devant mon nez, ainsi que de ces redoutables plis de l’aine, les trois s’associant pour rabattre mon regard là où il a envie d’être, bref, je suis ivre de cette mâlitude débordante, effrontée même lorsqu’elle ne l’est pas sciemment, insolente du simple fait d’exister.
Vision du bas vers le haut, du bas de ma position, à genoux, de mon admiration, mon adoration, ma soumission – soumission volontaire, jouissive – à la sexualité et au plaisir de mon mâle, vers le haut de sa position debout, de son regard lubrique, de sa puissance physique, sexuelle, de son envie de jouir, et, je le sais désormais, de me faire jouir avec lui.
Qu’est-ce que c’est beau et impressionnant, le corps masculin, lorsqu’on le regarde ainsi, du bas vers le haut, et qu’est-ce qu’elle est excitante, étourdissante, la sexualité d’un mec debout, lorsqu’on y goûte pendant qu’on est à genoux.
Je le suce lentement, repoussant encore et toujours sa jouissance. Puis, à un moment, le bogoss pousse une profonde expiration, sa main se lève, elle frôle ma nuque, mon cou, elle se retient, je sens qu’il a envie de m’attraper la tête et me faite avaler sa queue d’une seule traite, mais il se retient toujours, de justesse, mais il se retient. Il est à deux doigts de craquer, je le sens. Ce n’est qu’une question de secondes. Son excitation est à un tel niveau qu’il suffirait d’une petite étincelle pour le faire démarrer au quart de tour.
La petite étincelle va être mon geste inouï, l’affront de quitter sa queue pour aller titiller son frein du bout de ma langue, un instant plus tard, ses deux mains saisissent ma tête, et sa queue s’enfonce entre mes lèvres avec l’urgence d’une excitation extrême. Le bogoss n’attend pas une seconde de plus pour commencer à me pilonner la bouche sans répit, comme au bon vieux temps. Mon beau Jérém se lâche enfin : chassez le naturel, il revient au galop.
Au rythme de ses coups de reins, mon nez s’enfonce dans ses poils pubiens, mon front cogne contre son mur d’abdos, ses petites odeurs de mâle remontent par mes narines et me mettent en orbite. Sa queue me défonce la bouche, mais pas au point de me faire mal, juste au point de me faire terriblement « mâle » : et ça, c’est délicieux.
« Suce, vas-y, je sais que tu kiffes ça, tu kiffes ma queue » fait-il, tout en m’enfonçant son manche bien profondément dans ma bouche.
Je retrouve le Jérém domi. Je suis débordé par sa puissance virile, mais heureux.
« Qu’est-ce que j’aime te sucer » j’arrive à lui lancer, en sortant brièvement de mon apnée.
« Ah, putain, c’est bon, tu suces comme un dieu, vas-y, montre-moi ce que tu sais faire, fais-moi monter le jus » fait-il, tout en posant lourdement ses mains sur ma nuque et m’enfonçant à nouveau la queue jusqu’au bout de mon palais.
Je brûle d’envie d’exaucer son vœu, d’exécuter son ordre, mais en même temps, je ne veux pas que ça s’arrête aussi vite : je me dégage de la prise de ses mains et je quitte une nouvelle fois sa queue, j’attrape ses hanches, je l’invite à pivoter sur lui-même, à se mettre face au mur. Après une première petite résistance, le bogoss se laisse faire, je saisis ses fesses bien fermes et j’entreprends de lui faire une fellation de rondelle en bonne et due forme.
Je le sens encore monter en température et en pression, je le sens monter vers une zone rouge très dangereuse. Ce qui explique la raison pour laquelle, malgré son kiff pour ce genre de plaisir, quelques instants plus tard à peine, le bogoss se retourne brusquement, il me fourre une nouvelle fois queue dans la bouche et recommence à envoyer de bons coups de reins. Ses gestes ont quelque chose de virulent, la virulence de son envie de jouir, au plus vite. Une virulence que je retrouve également dans les mots qu’il ne tarde pas à lâcher, la voix cassée par une excitation à son plus haut niveau :
« Je vais jouir, et tu vas tout avaler ».
Je ressens alors un frisson qui manque de peu de me faire jouir sur le champ : car je reconnais instantanément les mêmes mots qu’il avait employés lors de notre première révision.
J’ai sacrement envie de lui offrir ce qu’il demande, mais en même temps, je lui ai promis un orgasme comme aucun autre, ainsi, alors que le bobrun s’imagine jouir au plus vite dans ma bouche, je me déboite, et je recommence à titiller son gland sur le point de gicler.
Un instant plus tard, tout s’emballe, ses mains m’attrapent par les aisselles, m’obligent à me relever : le geste est rapide, brusque, animal, la réaction en chaîne est amorcée, je ne peux plus l’arrêter, je perds le contrôle, et c’est avec le plus grand bonheur que je me laisse faire. Je me retrouve à plat ventre, sur le lit, Jérém crache sur ma rondelle, et il s’enfonce en moi d’une seule traite. Sa queue me pénètre, m’envahit, me transperce.
« Oh, putain, qu’est-ce qu’il est bon ton cul ! » je l’entends grommeler, fou d’excitation.
« Et ta queue, putain, qu’est-ce qu’elle est bonne ta queue ! ».
Le bogoss n’a besoin que de quelques coups de reins pour atteindre enfin cet orgasme tant attendu, pour gicler une fois de plus en moi. Et pour me faire gicler à mon tour, sans même me toucher. Ma jouissance me percute avec la violence d’un coup de tonnerre, je perds pied, et j’ai l’impression que mon cœur a des ratés, sa jouissance à lui, explose dans un cri retentissant, impressionnant, un cri à la fois de plaisir et de délivrance. Heureusement que nous sommes isolés et qu’il n’y a pas de voisin pour entendre le brame d’un jeune mâle en train de kiffer sa race.
« T’as joui ? » il me demande dans la foulée.
« Je viens de jouir, en même temps que toi, tu te rends compte de l’effet que tu me fais ? ».
Mon beau Jérém s’abandonne sur moi de tout son poids, il me serre fort contre lui, il pose de bisous sur mes épaules et mon cou, il me fait sentir bien même en cet instant, après l’amour, où le désir sexuel déchaîné disparaît brutalement et laisse la place à un besoin de tendresse tout aussi violent.
« Qu’est-ce que c’était bon » je l’entends chuchoter à mon oreille.
« Pareil pour moi, c’était trop trop bon ».
Ah, putain, qu’est-ce que ça fait du bien de me faire dominer par ce petit Dieu vivant, évoquant pour moi le mâle dans toute sa virilité, force et autorité, qu’est-ce que c’est bon de le voir se lâcher à fond pendant le sexe, et qu’est-ce que c’est bon après le sexe, tout aussi bon, si ce n’est plus encore, de retrouver les câlins, la tendresse, et de me blottir, et me sentir protégé, dans ses bras puissants.
Qu’est-ce que j’aime ce nouveau Jérém, cet être mi ange et mi mâle, toujours capable, pour peu qu’on le cherche, de jouer son petit macho pendant le sexe, mais capable aussi, après l’amour, de laisser ressortir cet adorable petit mec qui a besoin de douceur tout autant que j’en ai besoin.
« Qu’est-ce que j’aime quand tu es comme ça » j’ai envie de lui dire, j’ai envie qu’il sache.
« Comme ça, comment ? ».
« Quand tu es chaud bouillant pendant le sexe ».
« Tu kiffes ça, hein ? ».
« Grave ! Et aussi que tu t’inquiètes de mon plaisir à moi ».
« J’aime bien te voir jouir ».
« Je suis trop bien, là ».
« Moi aussi, je suis trop bien avec toi »
Dans la tanière, dans les bras de mon mâle brun, j’ai l’impression que rien ne peut m’arriver et que ce bonheur va durer à tout jamais. Et très vite, je m’endors.
Lorsque je me réveille, il fait nuit, dans la cheminée, le feu brûle toujours, la flamme est belle et vigoureuse, pendant que je dormais, Jérém a dû se lever et remettre du bois, et peut-être fumer une cigarette. Qu’est-ce que c’est bon de me sentir en sécurité, de me sentir pris en charge, de ne devoir m’occuper de rien, à part d’être heureux avec le gars que j’aime.
Mon bel étalon est endormi sur le dos, le haut de ses pecs et ses épaules dépassent de la couette, les bras pliés, les mains posées sur l’oreiller, de part et d’autre de sa tête, les aisselles délicatement poilues bien exposées à ma vue et à mon désir.
Après de nombreux orgasmes en quelques heures, il se dégage de son corps, et notamment de ses aisselles, une petite odeur prégnante qui n’est pas que le souvenir de sa transpiration, mais comme une odeur de sexe, une petite odeur de mâle. L’odeur des corps change après l’amour, l’entente sensuelle est aussi une question d’odeurs : et qu’est-ce qu’elle est bonne, cette entente, avec mon Jérém !
Je suis irrépressiblement attiré par son aisselle la plus proche de moi, je ne peux résister à la tentation de plonger mon nez dedans, de m’enivrer de ces délicieuses odeurs de jeune mâle.
« Il faut que je me douche » fait Jérém, la voix pâteuse.
« Tu sens tellement bon ».
« Je pue ».
« Tu sens l’amour, et le plaisir ».
Le bobrun me serre un peu plus fort dans ses bras, il couvre mon cou de bisous, je me blottis un peu plus dans ses bras, je serre sa main, je la presse contre mon cœur : elle est douce et chaude.
« Est-ce que j’ai été le premier mec avec qui t’as couché ? » je ne peux me retenir plus longtemps de lui poser la question qui me brûle les lèvres. Le moment me paraît propice, Jérém me semble prêt aux échanges les plus intimes.
Les volutes de fumée s’enchaînent avec une lenteur insupportable, et la réponse de Jérém tarde à venir : ce qui est déjà en soi une réponse à ma question, celle que je redoutais.
« Tu veux vraiment parler de ça ? » il finit par lâcher, en se tournant de trois quart par rapport à moi, et en me caressant avec son regard brun.
« J’ai envie de savoir, Jérém, je ne veux plus qu’il ait de non-dits, je ne veux plus de mauvaises surprises, j’ai besoin de te connaître, tu es trop important pour moi ».
« D’accord » fait-il, la voix basse, le débit de parole lent, le regard dans le vide.
« Tu n’as pas été le premier » il continue « mais tu es le premier avec qui j’ai été aussi loin ».
« C’est-à-dire ? ».
« Tu es le premier que j’ai sodo, et le premier qui a été plus qu’un coup d’un soir ».
« Ce sont qui les autres gars ? ».
« Le premier, c’était en camping à Gruissan, l’été dernier ».
Son regard est toujours perdu dans le vide, son profil est magnifique.
« Et tu l’as rencontré comment, ce mec ? »
« Il était au camping à la mer, il a commencé à me mater dès notre arrivée, il n’arrêtait pas, un soir il m’a demandé une clope, on est parti fumer ensemble, rien que tous les deux, et à la fin de la clope, il m’a proposé d’aller chez lui pour fumer un joint, on a fumé sur son lit, et quand j’ai été bien fait, il m’a sucé, il m’a fait jouir et il a avalé, j’ai toujours kiffé ça à mort, sur le coup, je n’ai pas réfléchi, j’ai joui et puis basta,
Le lendemain, j’avais un peu la gueule de bois, mais je me suis dit que c’était les vacances, que j’avais déconné avec un inconnu que je ne reverrais jamais, je me suis dit que je ne risquais pas grand-chose, car c’était lui qui avait pris tous les risques, et je ne risquais pas que ça se sache non plus, et, surtout, je me suis dit que ce serait une fois et plus jamais ».
Jérém tire une nouvelle taffe sur sa cigarette, il inspire longuement, il expire tout aussi lentement.
« Mais après, je n’ai pas arrêté d’y penser, j’avais trop kiffé, en arrivant sur Toulouse, j’avais envie de recommencer, de retrouver les mêmes sensations, alors, j’ai pensé à mon cousin Guillaume, j’ai toujours su qu’il me kiffait, je lui ai proposé de venir dormir à l’appart, je n’ai pas eu à insister longtemps pour qu’il me fasse la même chose que le mec du camping ».
Jérém marque une pause, il tire une nouvelle taffe sur la cigarette, et il continue :
« L’hiver dernier, il y a eu un match contre Pau, dans l’équipe du 64 il avait un gars, Patxi, il est resté faire la fête sur Toulouse, et il a dormi chez moi, lui aussi il a voulu me sucer, il m’a demandé de le baiser, mais je n’étais pas prêt ».
La cigarette se termine enfin, Jérém revient au lit, il me prend dans ses bras.
« Après c’est toi, mais avec toi, c’était différent ».
« Différent comment ? ».
« Différent parce que, parce que, c’est toi ».
« Et donc ? ».
« Tu m’as chevillé au corps » il finit par lâcher au bout d’un petit silence.
« Si tu savais comment tu m’as chevillé au corps, toi ».
Je ne peux me retenir de lui faire plein de bisous.
« Et après moi, ? » j’ai envie de savoir.
« Les autres, tu les connais, tu étais là ».
« Ton cousin ».
« Oui, Guillaume, d’ailleurs, je n’ai pas revu après cette nuit-là ».
« Pourquoi tu m’as fait venir chez toi, ce soir-là ? ».
« Je ne sais pas vraiment, ça faisait des mois que je ne couchais plus avec lui, et ce soir-là, je l’ai croisé en boîte, ce soir-là, j’avais bu, et j’avais envie de toi ».
« Et c’est pour ça que t’as ramené ton cousin pour le baiser ».
« J’étais paumé, mais quand il a été chez moi, j’ai eu encore plus envie de toi, j’avais envie que tu sois là, et aussi, j’avais le fantasme de coucher avec deux mecs qui se battraient pour me sucer et pour se faire baiser ».
« T’as pas été déçu ».
« Non, bien sûr que non, mais je regrette de t’avoir imposé ça, tu méritais davantage de respect ».
« Ça m’a fait bien chier de te voir coucher avec Guillaume ».
« Je sais, c’était nul ».
« Tout comme ça m’a fait chier de te voir coucher avec le type du On Off ».
« Une autre belle bêtise » il se morfond.
« Pourquoi t’as voulu aller au On Off cette nuit-là ? ».
« Parce que ça m’avait saoulé de te voir partir avec ce mec de l’autoécole ».
« T’étais jaloux ».
« Il faut croire ».
« Et alors, t’as voulu te venger ».
« Je voulais te montrer que je pouvais emballer d’autres mecs ».
« Ça, je le savais déjà ».
« Tu m’avais énervé, je voulais te faire mal ».
« Et il s’est passé quoi avec les deux mecs dans la backroom ? ».
« Rien ».
« Rien ? ».
« Rien de chez rien, eux, ils voulaient, mais je n’ai pas pu, c’était trop glauque, en fait, j’avais envie de te rentrer avec toi, mais tu m’avais trop énervé ».
« Pourquoi tu as proposé à Romain de venir baiser avec nous ? ».
« Ce type m’a cherché depuis le début, c’était la première fois que je ressentais un regard comme le sien ».
« Un regard comment ? ».
« Le regard d’un mec qui voulait, me baiser, alors, j’ai eu envie de lui montrer qu’il se trompait, qu’il ne me baiserait pas ».
« C’est pour ça que tu lui as proposé de venir avec nous ? ».
« Oui, c’est l’une des raisons ».
« Il y en a d’autres ? ».
« Une fois de plus, je voulais te montrer que tu ne comptais pas pour moi ».
« T’as bonne mine, toi, une heure plus tôt tu m’avais fait un sketch parce que j’avais failli partir avec Martin, et une heure plus tard tu voulais me montrer que tu pouvais baiser d’autres gars ».
« J’ai été archinul, je sais, la vérité, c’est que tu comptais pour moi, et même beaucoup, sinon je n’aurais pas été jaloux de te voir partir avec ce type, tu vois, je n’ai jamais été jaloux des gars qui ont emballé les nanas que je me suis tapées avant eux, oui, tu comptais, et ça, ça me faisait peur ».
« Moi je crois que le gars avait davantage envie de coucher avec toi qu’avec moi ».
« Je ne me fais pas prendre ».
« T’en as jamais eu envie ? ».
« Non ».
« Même avec un beau gars comme lui ? ».
« Pas une seconde ».
« Et même le fait de savoir qu’il en avait vraiment envie, ça ne t’a rien fait ? ».
« Non, non, non ».
J’ai m’impression que derrière tous ces « non », subsiste une réticence, derrière laquelle il cache une partie de son intimité qu’il n’est pas prêt à partager avec moi, ce que je ressens en revanche, comme je l’ai ressenti pendant cette fameuse nuit, c’est que ce Romain a vraiment troublé mon Jérém.
Est-ce que cette nuit-là, mon Jérém avait simplement eu envie de mater un mâle qui l’avait défié sur le terrain de sa virilité ? Ou bien, si je n’avais pas été là, il se serait laisser aller à explorer d’autres horizons de plaisirs avec ce magnifique mâle brun ? Est-ce qu’il se serait « plié » à ses envies, au lieu de les détourner pour préserver son ego de mâle dominant ? Jusqu’à quel point il aurait pu aller ?
« Pourquoi, quand il a demandé si je pouvais le sucer, tu as dit que je ne suçais pas, et quand il a voulu me baiser tu l’as laissé faire ? ».
« Parce que je n’avais pas envie que tu suces un autre gars. Mais si j’avais dit non encore une fois, j’aurais montré que j’étais jaloux, et ça, je ne voulais pas ».
« Mais t’as été jaloux de me voir coucher avec lui ».
« Ça a été très dur, en effet, en plus, pendant qu’il te baisait, il me narguait ce con, j’ai failli lui péter la gueule avant qu’il finisse son affaire ».
« T’as préféré dire que t’en avais rien à foutre que je couche avec lui, plutôt que d’avouer que ça te faisait chier » je résume.
« Je me mettrais des tartes ».
« Quand il est parti tu as voulu que je reste, et tu étais si différent ».
« Ce mec m’avait mis hors de moi, j’avais besoin que tu restes, j’avais vu que tu pouvais prendre ton pied avec un autre gars, et j’avais peur de te perdre ».
« Et il y a eu personne d’autre ? » je lance, prenant sur moi pour aller vers le sujet qui me hante. J’ai besoin de savoir ce qui s’est passé avec Thibault, j’ai besoin que ça sorte, même si je dois encore avoir mal, j’ai besoin que ça sorte parce que j’ai besoin de tourner la page, de lever toute ombre sur notre relation, et pour ça, j’ai besoin de comprendre.
« Ah, si, j’oubliais » fait-il, tout en marquant une pause, avant de continuer : « le dimanche soir juste avant le bac, j’ai fait un plan avec un gars ».
« Sans blagues, et tu l’as levé où ? ».
« A la Ciguë ».
Ah, ça alors, je ne m’attendais pas vraiment à ça, et surtout pas à ça : voilà ce qu’on appelle se prendre un coup de massue sur la tête.
« Ah, bon, tu fréquentes le milieu gay, maintenant ? » je le questionne, agacé.
« C’est la seule fois que j’y suis allé, ce soir-là, j’étais vraiment pas dans mon assiette, c’était le dimanche après la première nuit qu’on avait passée ensemble, tu te souviens ? C’était la fois où je t’avais débarrassé de ce gars qui voulait te cogner dans les chiottes de l’Esmé ».
« Je m’en souviens très bien, et pourquoi tu n’étais pas dans ton assiette ? ».
« Parce que je n’arrivais pas à arrêter de penser à toi, au fait que j’avais été odieux au réveil, en fait, je n’arrivais pas à arrêter de penser à toi, tout court, j’avais besoin de me changer les idées, et aussi, j’avais besoin de savoir si un autre mec me ferait autant d’effet que toi ».
« Et alors ? ».
« Avec ce type, c’était nul, j’ai failli débander, j’ai dû penser à quelqu’un d’autre pour y arriver ».
« Une nana ? ».
« A toi, banane ! ».
La liste des mecs de Jérém s’allonge, et une poussée de jalousie me guette, à fortiori vis-à-vis de ce plan survenu à un moment où nos révisions avaient deja commencé. Et pourtant, ça fait un bien fou de l’entendre dire que pendant ce plan, il a pensé à moi.
« Le jour où nous sommes clashés chez moi, tu m’as balancé que je n’étais pas le seul gars avec qui tu t’envoyais en l’air ».
« Je bluffais, je couchais avec aucun autre gars, avec des nanas, oui, mais avec aucun gars, je sais, ça n’excuse rien, si je t’ai balancé ça, c’est parce que je voulais te faire mal, assez mal pour que tu t’éloignes de moi, je n’avais pas le courage de te quitter, alors je voulais t’obliger à le faire à ma place ».
Le feu crépite doucement dans la cheminée, il accompagne la marche lente d’une nuit qui me paraît propice aux confidences.
« Et Thibault ? » je décide d’y aller franco.
Ma question est suivie par un silence qui semble durer une éternité, un instant où le temps semble comme suspendu, presque figé, un moment pendant lequel j’ai le temps de me demander si cette question ne va pas être la fausse note qui va tout gâcher dans ce moment parfait.
« Tu, sais ? » finit par lâcher Jérém.
« Thibault m’a tout raconté quand tu étais inconscient à l’hôpital ».
« Je n’en suis pas fier, tu sais ».
Je cherche quelque chose à dire pour briser le silence qui s’installe seconde après seconde, en vain.
« Tu dois me haïr » il continue.
« Je ne sais pas trop quoi penser, je voudrais juste comprendre, je voudrais juste savoir, pourquoi, c’était la première fois que vous ».
« Oui, enfin, non ».
« Oui ou non ? ».
« Il s’était passé un petit truc quand on était ados, on était en camping, sous la même tente, un soir, on avait bu des bières, on a juste joué au touche pipi ».
« Et vous avez remis ça, après ? ».
« En fait, il a failli se passer un truc juste avant la finale du tournoi cet été, et le soir même de la finale aussi, il ne s’est rien passé d’important, juste des caresses, un peu d’excitation, mais ça a failli aller plus loin, c’est moi qui a freiné ».
« Et pourquoi ça a dérapé entre Thibault et toi, cette fameuse nuit ? ».
Jérém prend une longue inspiration, avant de se lancer :
« Cette nuit-là, j’avais bu, j’avais fumé, et tu me manquais horriblement ».
« Je te manquais ? ».
« Oui, beaucoup, et l’idée de t’avoir fait souffrir me rendait fou, te quitter a été la chose la plus difficile et la plus stupide que j’ai fait de ma vie ».
« Et pourquoi tu l’as fait, alors ? ».
« A ce moment-là, te quitter me paraissait la seule solution, je voulais nous éviter de souffrir davantage, autant toi que moi, quand je serais à Paris, et que nous ne pourrions plus nous voir, mais ça a été aussi douloureux pour toi que pour moi ».
« Tu crois ? ».
« Le jour où nous nous sommes tapés sur la gueule, j’ai eu très mal en partant, t’étais en sang, et en larmes, et tout était de ma faute, j’avais une boule de feu dans le ventre, j’ai failli faire demi-tour et venir te serrer dans mes bras, j’avais envie de te demander pardon, mais je me suis dit que c’était le prix à payer pour te rendre ta liberté, et puis, ta mère était rentrée, je n’aurais pas osé, de toute façon ».
« J’avais le cœur en mille morceaux ».
« Je sais, moi aussi, alors, quelques jours plus tard, cette fameuse nuit, Thibault a senti que je n’allais pas bien, il est venu me prendre dans ses bras, dans le clic clac du salon où je dormais, je ne crois pas qu’il avait prévu qu’il se passe quelque chose, et moi non plus. Je crois que cette nuit-là on avait besoin l’un de l’autre ».
« Et ça vous a fait du bien ? ».
« Sur le moment, oui, après, Thib m’a pris dans ses bras, et j’étais bien, je me suis même endormi, je me suis réveillé dans la nuit, avec une seule envie, celle de me barrer, je me suis levé pendant que Thib dormait, j’ai pris mes dernières affaires et j’ai foutu le camps au beau milieu de la nuit, comme un voleur, sans la moindre explication, je n’ai pas été foutu d’assumer ce qu’on venait de faire, alors que j’étais autant d’accord que lui pour le faire,
Après ça, tout a changé entre nous, du jour au lendemain, on s’évitait, surtout moi, je l’évitais, j’avais peur de ses sentiments, comme des tiens, je ne savais pas comment gérer ça, je ne savais pas comment le retrouver, après ça,
Après, il y a eu l’accident, Thib est venu à l’hôpital quand je me suis réveillé, quand il est venu, mon père et Maxime étaient là aussi, Thib a pris sur lui, il a fait comme si de rien n’était, il a déconné avec Maxime, il a discuté avec mon père, il a eu des mots pour me remonter le moral, et pourtant, je sentais un malaise entre lui et moi,
Quand j’ai quitté l’hôpital, je l’ai appelé, je voulais lui proposer de nous voir, je voulais m’excuser d’être parti comme un con cette fameuse nuit, je voulais lui dire à quel point son amitié comptait pour moi, mais je n’ai pas réussi, à chaque fois qu’il y avait un blanc, et que j’étais sur le point de faire un pas vers lui, il repartait dans une autre direction, comme s’il voulait garder une distance ».
« Il fait la même chose avec moi ».
« Tu as eu de ses nouvelles, toi ? ».
« Je l’ai appelé il y a quelques jours, mais il a coupé court, je pense qu’il m’en veut, je me suis mal comporté avec lui ».
« Pourquoi ça ? ».
« Parce que j’ai été horrible avec lui à l’hôpital, quand il m’a raconté ce qui s’était passé entre vous, j’étais tellement blessé que je suis parti, je l’ai laissé tomber, sans essayer de comprendre, et pourtant, j’ai bien senti à quel point il se sentait mal, vis-à-vis de votre amitié, et aussi vis-à-vis de moi, de plus, il se sentait responsable pour ce qui t’était arrivé ».
« Il se sentait responsable de mon accident ? ».
« Oui, il savait que depuis quelques temps tu n’allais pas bien, et il avait pressenti qu’à un moment ou à un autre tu risquais de partir en vrille, alors, il s’en voulait de ne pas avoir su veiller davantage sur toi, il s’en voulait pour ce qu’il s’était passé avec toi, parce qu’après ça, tu étais parti de chez lui et il n’avait pas pu être là pour toi ».
« Le pauvre Thib, il a morflé encore plus que je l’avais imaginé, et il doit toujours morfler » fait Jérém, dépité, et il continue : « vraiment, il ne faut pas en vouloir à Thib, c’est un gars en or, c’est la gentillesse en personne, je savais qu’il avait des sentiments pour moi, j’aurais dû faire davantage attention à lui, il avait toutes les raisons de craquer, c’est moi qui aurait dû être plus fort, je n’aurais pas dû coucher avec lui ».
Jérém se lève pour aller rajouter du bois dans la cheminée. Puis, il s’allume une clope, il tire une longue taffe et il expire lentement la fumée. Son regard se pose dans le vide, comme perdu, il a l’air tellement ailleurs qu’il en oublie même sa cigarette, coincée entre ses deux doigts, et qui brûle pour rien.
« Je crois qu’entre Thib et moi ça ne sera plus jamais comme avant » il rajoute au bout d’un long silence.
Je ne peux m’empêcher de me lever à mon tour pour aller le prendre dans mes bras et lui faire des bisous.
« Moi je crois que ça va finir par s’arranger, une amitié comme la vôtre ne disparaît pas comme ça, laisse-lui un peu de temps ».
« Heureusement que je t’ai toi » il me chuchote, adorable.
« Je me souviens d’un soir, au KL, où tu es parti avec Thibault et deux nanas » j’enchaîne.
« Une autre belle connerie signée Jérémie Tommasi ».
« Je me souviens qu’au moment tu m’as bien regardé pendant que tu embrassais l’une des filles ».
« Quand j’ai vu que tu étais là et que tu me matais, j’ai voulu savoir dans quel état te mettrait de me voir partir pour une partie de jambes en l’air ».
« J’en étais malade ».
« Je sais, je suis désolé ».
« Alors, comment s’est passé ? ».
« On a passé le temps à baiser les nanas, et à nous mater l’un l’autre, cette nuit-là, j’ai bien capté que Thib ressentait plus que de l’amitié pour moi ».
« Tu crois qu’il avait déjà envie de coucher avec toi ? ».
« Je crois, oui ».
« Et toi ? T’avais déjà envie de coucher avec lui ? ».
« C’est la question que je me suis posée pendant toute cette fameuse nuit, est-ce que j’avais vraiment envie de coucher avec mon meilleur pote ? Il y avait une attirance, certes, mais peut-être pas au point de franchir le pas, de toute façon, je ne pouvais pas imaginer mettre en danger notre amitié à cause d’une coucherie ».
« Mais vous aviez déjà couché ensemble, au camping ».
« Mais c’était différent, nous n’étions que des gosses, à ce moment-là, on pouvait mettre ça sur le compte de notre bêtise, mais remettre ça après le plan avec les nanas, alors que nous étions « adultes », ça aurait eu une toute autre résonance ».
« C’est vrai » j’admets.
« Après que les nanas ont été parties, Thibault est resté dormir chez moi, cette nuit-là, il ne s’est rien passé de plus, à part que, dans son sommeil, Thib est venu me prendre dans ses bras, il ne sait pas que je m’en suis rendu compte, je n’ai pas voulu qu’il sache, je crois que ça l’aurait vraiment mis mal à l’aise ».
« Et après cette nuit ? ».
« Après cette nuit, j’ai commencé à « réviser » avec toi, et je n’ai plus pensé à cette attirance pour Thib ».
« Mais ce n’était pas son cas à lui » je considère.
« Non ».
« Mais alors, pourquoi tu lui as proposé de coucher avec nous ? ».
« Bonne question, ce soir-là aussi j’avais bu, et j’avais pas mal fumé aussi, mais ça n’explique pas tout, loin de là, déjà, c’était l’occasion de lui « avouer » ce qui se passait entre nous, ça faisait un petit moment que ça me trottait dans la tête, je me doutais bien qu’il savait, mais je ne savais pas comment m’y prendre, j’avais peur de sa réaction ».
« T’avais peur qu’il te rejette ? ».
« Un peu oui, mais j’avais surtout peur de lui faire de la peine, cette nuit-là, je voulais lui montrer à lui aussi qu’entre toi et moi ce n’était qu’une histoire de cul, je me suis dit qu’en couchant avec nous, il comprendrait tout ça, que je n’avais pas de sentiments pour toi, parce que je n’étais pas pd, je me disais que ça lui ferait moins mal,
Je voulais aussi te montrer, à toi aussi, qu’entre nous deux ce n’était que de la baise, je me suis dit que si je me montrais odieux avec toi, que si je te montrais que ça ne me faisait rien de te voir coucher avec mon pote, tu arrêterais de me demander autre chose, et je voulais me montrer à moi aussi qu’entre nous il n’y avait rien d’important, je voulais savoir si vraiment ça ne me faisait rien de te voir coucher avec mon pote ».
« Ce que je n’avais pas prévu, c’est l’attitude que Thib allait avoir vis-à-vis de toi ».
« Quelle attitude ? ».
« Celle que j’aurais voulu être capable d’avoir moi-même avec toi, celle d’un mec qui assumait, un mec qui te respectait, alors, j’ai été jaloux, jaloux de voir que tu avais aimé coucher avec Thib, car Thib t’avait apporté quelque chose que moi je n’étais pas capable de te donner, j’avais voulu qu’il te baise, il te faisait l’amour, comme je ne te l’avais jamais fait, comme je ne l’avais jamais fait à personne ».
« C’est parce que t’étais jaloux que t’es devenu de plus en plus brutal ».
« Oui, je crois, j’ai été trop loin ».
« Même Thibault a essayé de te calmer ».
« Ce gars est vraiment adorable, et ce soir-là, il m’a même appris ce que c’est de faire l’amour, du coup, j’avais vraiment peur que tu prennes plus de plaisir avec lui qu’avec moi ».
« Avec Thibault j’ai ressenti des trucs que j’aurais voulu ressentir avec toi, mais je n’ai jamais pris davantage de plaisir qu’avec toi, avec personne ».
« Même pas avec ce type qui est parti en Suisse ? ».
« Non, même pas avec Stéphane, ce mec m’a avant tout appris à m’accepter, à me respecter, à exiger d’être respecté, à m’assumer aussi, je ne dis pas que je n’ai pas pris de plaisir avec lui, mais avec toi, c’est autre chose, avec toi, c’est juste explosif, c’est comme si mon corps était fait pour le tien, et le tien pour le mien, alors, non, je n’ai jamais pris davantage de plaisir qu’avec toi, et non seulement parce que tu es un champion de la couette, mais parce que toi, t’es le gars que j’aime ».
« T’es mignon ».
« Et t’as reparlé de cette nuit avec Thibault ? La nuit que nous avons partagée tous les trois, je veux dire ».
« Jamais, je n’avais vraiment pas envie d’en parler avec lui, c’était déjà bien assez compliqué dans ma tête, je me demandais comment Thib avait vécu cette nuit, je me demandais aussi comment toi tu avais vécu cette nuit, je me demandais ce que Thib pensait de ma façon de me comporter avec toi, je me demandais même si Thib n’allait pas tomber amoureux de toi, et toi de lui, peut-être qu’on aurait dû en parler, ça aurait peut-être évité ce qui s’est passé par la suite ».
« Avec les si ».
« Bref, c’était le bordel, ce plan a été une grosse erreur, il n’a amené que des problèmes ».
Quand j’y pense, je me dis que sur le moment, les conséquences immédiates de ce plan avaient été difficiles à assumer pour tout le monde, pour les gars de 18-19 ans que nous étions à l’époque.
Pourtant, à distance de tant d’années, je suis désormais persuadé que cette nuit du plan à trois n’avait pas été l’erreur monumentale que dépeignait Jérém : car, à bien regarder, elle avait quand même permis de révéler au grand jour un certain nombre de non-dits qui avaient besoin de se confronter à la réalité, et ceci, afin que tous les trois puissions aller de l’avant.
Chez Jérém, cette nuit avait réveillé une nouvelle fois sa jalousie, et sous une forme inédite et particulièrement insidieuse : elle l’avait confronté à la douceur de Thibault, cette douceur dont j’avais besoin, elle lui avait fait entrevoir la possibilité de me perdre, lui permettant de réaliser à quel point il tenait à moi.
Quant à moi, cette nuit m’avait fait comprendre à quel point j’avais besoin d’une tendresse « à la Thibault », mais venant de mon Jérém, une tendresse que je n’ai jamais arrêté de rechercher, une quête qui a provoqué pas mal de déconvenues, avant de me permettre de toucher le cœur de mon Jérém.
Oui, cette nuit a probablement constitué la première maille d’un enchaînement d’évènements plutôt logique : d’abord, dans une certaine mesure, cette nuit avait provoqué l’évolution de ma relation avec Jérém pendant la semaine magique (comme si l’attitude de Thibault à mon égard pendant cette fameuse nuit avait porté ses fruits, et crée un cheminement dans la tête de mon bobrun), semaine magique qui avait d’une certaine manière conduit à notre clash violent, ce dernier préparant le terrain pour la coucherie entre Jérém et Thibault, clash et coucherie qui, dans une certaine mesure, ont certainement joué un rôle dans l’accident de Jérém, accident qui, enfin, a joué un rôle important dans le fait que Jérém soit revenu vers moi.
Rien n’arrive par hasard, et tout a contribué, d’une façon ou d’une autre, à nous réunir, Jérém et moi, dans cette pette maison perdue dans la montagne, devant ce bon feu de bois, à nous mettre l’un dans les bras de l’autre. Voilà ce que je réaliserai plus tard.
Ce que je réalisais déjà à ce moment-là, en revanche, c’est que le grand perdant de notre plan à trois, avait été Thibault. Chez le bomécano aussi, cette nuit avait dû réveiller une forme de jalousie, pourtant étouffée par son abnégation presque héroïque, cette nuit, Thibault avait été témoin du fait que, malgré le comportement de Jérém à mon égard, ce dernier tenait vraiment à moi, et que ce que je vivais avec Jérém, lui il ne l’aurait jamais.
Et cette nouvelle coucherie avec son pote Jéjé avant l’accident, n’a rien dû arranger. L’accident, non plus. Et mon attitude à son égard, non plus. Thibault a raison de m’en vouloir. Dès que je rentrerai sur Toulouse, et avant de partir pour Bordeaux, je vais aller le voir. C’est urgent.
Je réalise soudainement que la respiration de mon Jérém est devenue lente et profonde : je crois que mon bobrun vient de s’endormir.
« Bonne nuit, mon amour » je lui chuchote, persuadé qu’il ne m’entend déjà plus.
« Il faut vraiment qu’on essaie de dormir un peu, demain on a une balade à faire » il lâche, alors que le ralentissement de son débit de parole annonce que le sommeil est en train d’avoir raison de lui.
« Oui, c’est vrai ».
« Je suis vraiment content que tu sois là, MonNico ».
Je sais à présent ce que ça veut dire « MonNico » : il n’y a pas besoin d’explications, ce n’est que du pur bonheur.
« Toi aussi tu as bouleversé ma vie » je l’entends lancer, la voix pâteuse.
« De quoi ? » je fais, surpris.
« Pendant que j’étais dans le coma, tu m’as dit que j’avais bouleverse ta vie ».
« Tu te souviens de ça ? ».
« Je me souviens de tout ».
Commentaires
Yann
Cet épisode est très dense en révélations. J & N tendent à devenir un couple qui ne se cache rien de leur vie passée et pendant les débuts tumultueux de leur relation. On découvre un Jerem qui se met à nu (au figuré car au propre c’est déjà fait depuis longtemps ). D’un seul coup dans cet épisode on comprend le pourquoi de ses attitudes passées et il n’en est pour moi que plus attachant alors que souvent je lui aurais bien mis des baffes. Si le personnage de Jerem a probablement perdu en mystère il y a par contre beaucoup gagné en sensibilité. Reste la question que posait Etienne sur l’épisode précédent comment va-t-il se comporter avec Nico devant les autres pour leur sortie. Va-t-il le présenter comme un pote ou comme son amoureux ? Jusque là ils on vécu isolé du monde extérieur une sorte de lune de miel mais il va leur falloir affronter la réalité de la vie au quotidien avec le regard des autres mais aussi leur éloignement ; les études pour l’un le rugby pour l’autre.
Je suis un peu triste pour l’amitié très forte entre Thibault et Jerem aussi avec Nico. Je ne pense pas qu’il soit le perdant de l’histoire à son cœur défendant, même si il éprouve depuis longtemps des sentiments pour son pote, il a tout fait pour pousser Jerem à voir la chance qu’il avait avec Nico qu’il a toujours soutenu dans sa relation houleuse avec Jerem. J’aimerai bien que Thibault fasse le premier pas d’une réconciliation avec J&N mais ce n’est pas moi qui écrit l’histoire et c’est aussi bien comme ça car j’aurais le plaisir de découvrir ce que Fabien à imaginé qui je n’en doute pas sera à la hauteur de ce qu’il a fait partager jusque là.
Perock
Mercredi 24 Avril 2019 à 08:10
Quel enfoiré, il a intérêt à rappelé Thibault prochainement !
Ludovic
À quand la suite ? TwT
- fab75du31 Lundi 29 Avril 2019 à 12:11
- Vendredi lol
Chris-j
J’espère laisser un commentaire qui rende compte avec justesse ce que je pense de cet épisode qui est un des plus beaux de tous.
Je passe sur la scène sexuelle, qui est top, et qui se passe de commentaires.
En cherchant à mettre des mots sur leur entente physique, Nico et Jérém battent en brèche certains lieux communs véhiculés par la mauvaise psychanalyse. L’idée qu’un homosexuel ne serait attiré que par sa propre image, sans avoir accès à l’altérité incarnée par l’autre sexe. Ils seraient des zombies, incapables de jouir, condamnés à chercher, sans jamais trouver, des partenaires susceptibles de les satisfaire.
L’autre reste un inconnu quelqu’en soi le sexe. Le masculin et le féminin est en nous, qu’on soit homme ou femme. Il y a beaucoup d’hétéro qui n’ont pas accès à l’altérité, ou qui ne la cherche surtout pas. Certainement qu’il y a des homo qui sont comme ça aussi. Je n’ai pas vraiment cette impression en ce qui concerne Jérémie et Nicolas ou même Thibaut.
Soit dit en passant, si Nico pense que le plaisir passif est d’abord un plaisir mental, d’après ce que Jérém lui confie, le plaisir de l’actif l’est tout autant.
La deuxième partie du chapitre est celle qui retient toute mon attention. En général, j’aime lire les réflexions de Nico sur les situations et sur lui-même. J’aime son ressenti, parce qu’il accepte de faire connaitre aux lecteurs ses pensées les moins nobles, comme la jalousie. Il nous fait part de son envie d’être reconnu par Jérém. On nous dit tellement que chercher de la reconnaissance, n’est que de l’égoïsme. C’est sans doute vrai, mais en partie seulement.
Vis à vis du lecteur, il ne se la raconte pas.
Il y a des moments qui me marquent plus que d’autres. Les rencontres, toujours ambiguë, Nico/Thibaut, la scène ou Jérém croise Nico et Martin, l’appel que Jérém passe à Nico, la rencontre sous la Halle de Campan etc…Et puis donc, celle là.
Au coeur de la nuit, quand il trouve le bon moment, pour obtenir les réponses aux questions qui restent en suspens depuis le début de leur relation. Nico va être impressionnant de maitrise.
Sa question est limpide, mais plutôt ardue.
« J’ai envie de savoir, Jérém… je ne veux plus qu’il ait de non-dits… je ne veux plus de mauvaises surprises… j’ai besoin de te connaître… tu es trop important pour moi… ».
En acceptant de s’expliquer Jérémie, se dévoile, comme il ne l’a pas fait depuis très longtemps, si tant est qu’il l’ai jamais fait un jour, avec Thibaut par exemple. Ensemble, ils vont égrainer les 6 mois passés, ce qui a été fait, en bien, mais souvent en mal.
L’impatience est un des défauts de Nico, qui ne laisse pas toujours à Jérémie le temps pour s’exprimer.
« Tu m’as manqué – Toi aussi tu m’as manqué, Je suis content de te voir – non c’est moi qui suis content » . On a envie de lui dire laisse le parler !
Mais ce soir là, il sait attendre et entendre. Il est parfois ferme, il encourage, il ne juge pas et quand il est sceptique, il le garde pour lui.
Tous les mecs, tous les plans vont y passer.
J’imagine que la scène se passe dans le calme, les voix sont basses, parfois très basses. Sa détermination rend Nico très masculin.
De ce que je comprends, Nico est comme un taureau dont le corps est transpercé par les coups d’épée du toréador. Il est debout, vaillant, toujours prêt à faire face, mais pour trouver l’apaisement, il lui faut quand même guérir de ses blessures et c’est Jérémie qui peut le faire. Et il le fait en retirant les épées une à une.
La franchise rend bobun encore plus beau.
Certes, ce n’est pas ce que Nico appelle « un bon gars ». Il se laisse dirigé par un égo fragile, il se déleste de ses peurs en les faisant supporter à un autre. Nico en a été la victime, mais aussi Thibaut, voir même les inconnus de passage. On a pas à le juger, mais c’est un constat.
Cela a donné des scènes cultes, excitantes, mais il a fait beaucoup de mal à Nicolas et il le savait. Bien sur, personne n’a imposé à Nico d’accepter de se laisser humilier, peut être même, en allant plus loin dans l’introspection, qu’on pourrait trouver dans l’attitude soumise de ce dernier, une rage de posséder à tout prix. Va savoir?
Jérémie est beau parce qu’il est vulnérable et que pour une fois il fait passer Nico avant lui.
Jérémie a un peu peur du jugement de Nico quand même. Il a peur de le perdre et il aurait bien évité le sujet Thibaut. Nico est impeccable dans sa démarche. Je crois qu’inconsciemment, il ne veut garder aucune rancune envers bobrun.
Thibaut est un second rôle dans leur histoire mais c’est un rôle indispensable dans leurs vies. Lui aussi est victime de la lâcheté d’un Jérém qui comprenait les enjeux de leur relation. Une fois encore, il a choisi la pire des solutions qui le conduit toujours à se sentir coupable et à avoir des remords.
Du coté de Nico, je ne vois aucune colère envers Jérém. Receuillir la parole de Jérémie a sans doute été un exercice un peu dur par moment, mais au final, si il n’est pas trop bête, il a compris qu’il est quelqu’un d’important pour Jérémie. Certes, bobrun ne lui dit pas « je t’aime ». C’est joli d’entendre je t’aime mais sait-on vraiment ce que cela veut dire.
Jérémie ne lui dit-il pas que leur rupture avait été une souffrance aussi grande pour lui que celle qu’il a pu ressentir. Que dire de plus.
Que c’est-il passé pendant le 15 jours qui vont de l’accident à la nuit qu’ils sont en train de vivre. Saura t-on un jour ce qui s’est passé dans la tête de Jérém pour qu’il soit capable de faire tous les gestes qu’il fait depuis qu’ils sont ensemble? J’aimerais le savoir.
J’aimerais savoir comment on bascule d’une histoire d’adolescents qui découvrent les sentiments sans savoir les maitriser à plus que ça.
A la première lecture, je n’avais pas fait gaffe à la fin. On change de registre. Il fait plus que dire je t’aime, bien plus même.
En ce qui me concerne, à part en écoutant Diana Ross, Barbra Streisand ou Barbara, c’est rare que je ressente des frissons qui vont des avant-bras, au bord des yeux. Son ultime confidence, avant qu’il ne s’endorme, m’en a donné plein.
- fab75du31 Jeudi 22 Juillet à 12:43
- Je viens de relire ce magnifique commentaire et je suis très touché
Laisser un commentaire