LT0109 Le livre de Thibault – Il n’y a rien de tel que des potes
Avertissement.
Faute de temps pour réécrire les passages, cet épisode de l’histoire de Thibault est racontée du point de vue de Nico (extraits des épisodes originaux de Jérém&Nico).
Seuls certains passages entre parenthèses carrées donnent les sentiments de Thibault.
Lundi 24 septembre 2001.
« Tu as des nouvelles de Thib ? » me demande Jérém au téléphone.
« Je l’ai vu hier soir ».
« Il va bien ? ».
« Il a été blessé en intervention, il a un genou en vrac ».
« Merde ! ».
« Mais c’est surtout le moral qu’il a en vrac. Ce qu’il a vécu l’a vraiment secoué. Il a le moral dans les chaussettes. Mais il te passe le bonjour ».
« Tu sais quoi, Nico ? ».
« Quoi ? ».
« Je vais passer quelques coups de fil et je vais organiser une petite soirée ».
« A quoi tu penses ? ».
« Je vais voir. Je te tiens au courant ».
Jérém me rappelle en milieu d’après-midi.
« On se retrouve à 18h30 en bas de chez Thib ».
« D’accord, j’y serai ».
« Tu savais qu’il avait une copine, et qu’elle vit chez lui ? » il me questionne.
« Je l’ai rencontrée hier soir ».
Jérém m’explique que Nathalie a été contactée pour savoir si Thibault était assez en forme pour apprécier une petite soirée entre mecs. Elle a répondu que oui, mais qu’elle ne serait pas de la partie puisqu’elle part travailler à l’hôpital à 18 heures pour la garde de nuit. Ce qui tombe plutôt bien, car une soirée entre mecs, c’est une soirée entre mecs ! Je me dis qu’elle doit ignorer que je fais partie de l’expédition. Et puis, de toute façon, je l’emmerde.
A 18h30, en bas de chez Thib, nous sommes quatre. Je me retrouve en compagnie de trois rugbymen, mon Jérém, ainsi que Thierry et Julien, les bras chargés de pizzas et de bières. Ce soir, les « quatre fantastiques », les « quatre inséparables » de l’ancienne équipe de rugby vont à nouveau être réunis. La soirée s’annonce belle et émouvante.
Je regarde les trois potes discuter et déconner entre eux. Julien et Thierry questionnent Jérém sur ses entraînements parisiens, ils le charrient. Leur complicité me fascine toujours autant.
Je suis très fier de l’initiative de Jérém. Y aller tout seul, ça aurait été compliqué. Mais réunir les « quatre fantastiques », je trouve ça une idée de génie. Je suis certain que revoir ses potes va faire du bien au jeune pompier blessé. Je suis tout excité à l’idée de voir sa réaction.
Nous prenons l’ascenseur et dans le petit espace je suis happé par le mélange de parfums de jeunes mecs, par leurs rires, leur bonne humeur, leur joie de vivre. Je me dis que c’est exactement ça dont Thibault a besoin.
C’est Thierry qui se charge de taper à la porte du jeune pompier.
« Qui c’est ? » j’entends Thibault demander depuis le salon.
« Le livreur de pizzas ».
« C’est pas ici, je n’ai rien commandé. Vous faites erreur ».
« Non, il n’y a pas d’erreur. Sur l’adresse il y a marqué « Sacré Thib, pompier valeureux, futur gagnant du Brennus, un pote en or massif ».
« Thierry, c’est toi ? ».
« Tu le sauras quand tu auras ouvert la porte ».
« Il va me falloir un peu de temps, andouille ».
« Je ne suis pas pressé. Ne te casse pas la gueule, papi ».
« Qu’est-ce que tu… » fait Thibault en ouvrant la porte.
« Salut !!! » lancent les gars, en une seule voix, un cœur viril.
« Qu’est-ce que vous… » il tente de se reprendre.
« On s’invite pour une petite soirée. On a tout prévu, la bouffe et surtout la boisson » lâche Thierry, face à un Thibault bouche bée, l’air surpris et touché.
Les retrouvailles démarrent à grands coups de bises viriles.
Nous nous retrouvons ainsi chez le beau pompier à partager des pizzas, des bières (juste une pour moi), des pétards (à peine quelques taffes pour moi) et de la bonne humeur. Beaucoup de bonne humeur. Thierry est vraiment un joyeux luron, je pense qu’il serait capable de faire rire une statue de cire.
Très vite, la complicité des quatre fantastiques renaît à l’évocation des souvenirs des expériences marquantes qu’ils ont partagées. Pendant de longs moments, la conversation porte sur le rugby, sur les matchs, sur les actions de la dernière saison qui ont mené leur équipe à gagner le tournoi.
Très vite, comme la veille pendant la conversation entre Jérém et mon père, je me sens un brin exclu de cette conversation, mais je m’en fiche. C’est une soirée pour Thibault et l’important c’est qu’il se sente bien. Et le beau pompier a l’air heureux et ça fait plaisir à voir. Et ce qui me fait plaisir par-dessus tout, c’est de le voir discuter avec Jérém, rigoler avec, dans une complicité qui ressemble à celle du bon vieux temps. Je serais tellement heureux s’ils pouvaient enfin retrouver leur amitié d’antan !
La soirée avance dans la bonne humeur et la détresse semble peu à peu disparaître du regard du jeune pompier. Je le regarde prendre vigoureusement part à la conversation, rigoler jusqu’à ce que ses blessures ne le rappellent à l’ordre.
« Putain, ça fait mal » fait-il à un moment, en se tenant le cœur.
« T’es bon pour la casse » fait Thierry en passant un bras autour du cou de son pote blessé.
« Je crois, oui… ».
« Allez, à partir de maintenant, on va se raconter des trucs qui ne font pas rire. On va parler de taf et de filles moches. Il faut économiser papi ».
« Mais ta gueule ! ».
Et la conversation repart de plus belle, les rires fusent, alors que Thibault apprend à maîtriser les siens pour ne pas avoir mal.
A aucun moment, il est question de parler de ce que Toulouse a vécu deux jours plus tôt. A aucun moment, il est question de parler de ce que Thibault a vécu deux jours plus tôt.
On le questionne sur ses débuts au Stade Toulousain, on le félicite pour sa chance. Son discours, son attitude me semblent plus optimistes que ceux de la veille. Cette soirée a vraiment l’air de faire du bien à mon pote Thibault.
« Eh les gars, vous savez qui j’ai vu il y a quelques jours ? » fait Julien, le petit blond gaulé comme un Dieu, au cours d’un joint partagé à quatre, alors que minuit a sonné depuis quelques minutes.
« Qui donc, le Pape en culotte ? » déconne Thierry, dont l’humour est en train de virer au stone.
« T’es con… j’ai vu Akim ! ».
« Ah, il est toujours vivant celui-là ? » fait Jérém.
« Oui, il m’a appelé un week-end et j’ai été le voir à Albi ».
« J’ai toujours trouvé dommage qu’il parte en milieu de saison » fait Thierry « c’était un bon joueur ».
« Il a trouvé du taf là-bas » explique Julien.
« Mais il n’a pas vécu la finale. Il n’a pas été champion. Alors qu’il le méritait » considère Thibault.
« Et si on allait lui faire un petit coucou ? » lance Thierry
« N’importe quoi » fait Julien.
« Pourquoi pas, les gars ? » insiste le joyeux luron.
« Là, maintenant ? » fait Jérém, étonné.
« Oui, maintenant, patate ! Je pense que tout le monde a envie de lui faire un petit coucou. C’est l’occasion ou jamais. Depuis quelque temps, on ne se voit plus tous les jours, si tu as remarqué ».
« C’est pas faux ».
« Mais c’est tard » fait Julien.
« Akim a toujours été un couche-tard ».
« Mais on a tous bu et fumé » insiste Julien.
« Pas Nico » fait Thierry « Qui est partant ? ».
L’immeuble des Minimes possède un ascenseur mais Thibault est évacué par les escaliers à bout de bras par ses anciens co-équipiers, ce qui a l’air de bien l’amuser.
Nous voilà à cinq dans la voiture de Thierry, sur la route vers Albi. Je suis au volant, je promène cette joyeuse bande de bogoss déconneurs. Il n’y a presque pas de circulation à cette heure, nous avons la route que pour nous et la nuit étoilée nous appartient, comme cette escapade, tout comme cet instant de folie et de liberté. Enveloppé par la musique à fond la caisse, par une ambiance de camaraderie qui me touche profondément, je suis heureux. J’adore cette drôle de soirée.
« Appuie sur le champignon, papi ! » me charrie Thierry.
« Fiche lui la paix » fait Thibault.
« Si on continue comme ça, il va être reparti au taf quand nous allons arriver ! » persiste le clown de la bande.
Thierry se moque de ma conduite qu’il trouve excessivement prudente. Mais je m’en fous. Car, je le sens, c’est sa façon de m’intégrer à ce petit groupe.
Encore que, sur le fond, il n’a pas tort. Il me faut plus d’une heure pour arriver à Albi. Il est 1h30 quand Thierry sonne (longuement) à l’interphone d’Akim.
Akim, le genre de prénom qui sonne à mon oreille comme une promesse de sexytude masculine d’ailleurs.
« C’est qui ? » fait une voix enrouée.
« Police Nationale » fait Thierry « nous savons que vous détenez des substances illicites chez vous ».
« Quoi, c’est quoi ces conneries ? Vous avez vu l’heure ? » fait la voix masculine dans l’interphone.
« Ouvrez monsieur Akim, magicien de mêlée, ou nous allons envoyer les équipes d’assaut ».
« Thierry, c’est toi ? ».
« Comment tu m’as reconnu ? ».
« Magicien de mêlée ».
« Ah, je me suis trahi… ».
« Tu fais quoi là ? ».
« Je ne suis pas seul ».
« Y a qui avec toi ».
« Ouvre et tu verras ».
« Putain, tu fais chier, je dormais, je travaille demain… ».
« OUVRE !!! ».
Nous retrouvons ledit Akim dans un petit appart. Mon intuition ne m’a pas trompé. Comme prévu, le prénom Akim s’applique à un gars bien sexy. L’ancien co-équipier de Jérém est un charmant reubeu au physique élancé, très brun et au regard de braise. Il nous accueille habillé d’un débardeur blanc qui met bien en valeur la couleur mate de sa peau et d’un survet en tissu molletonné.
Là encore, les retrouvailles sont touchantes. Thibault est ému. Je crois comprendre que lui et Akim étaient très proches lorsqu’ils jouaient ensemble.
« Je trinque à Thibault » fait le beau reubeu après avoir appris la mésaventure du jeune pompier, en entrechoquant sa bière avec celles de ses anciens co-équipiers « un gars comme ça » il continue, tout en levant fièrement le pouce « le gars qui m’a tout appris au rugby ».
« Tu savais déjà jouer » tente de se « dédouaner » Thibault.
« Je savais jouer mais je n’étais pas un joueur. Tu m’as appris l’esprit d’équipe. Tu m’as intégré à l’équipe. Si tu n’avais pas fait des pieds et des mains pour que je joue avec vous, j’aurais recommencé mes conneries de petit dealeur minable. Et les keufs m’auraient embarqué pour de bon. J’étais dans la cité, au chômage et le rugby était tout ce que j’avais. Tu m’as donné la chance de m’en sortir. Alors, oui, tu m’as tout appris au rugby. Et à la vie aussi. Parce que tu m’as appris avant tout comment être un mec bien. Tu m’as obligé à être un mec bien. Je voulais que tu sois mon pote et j’ai vite compris que pour que cela arrive, il fallait que je sois un mec bien, comme toi. Tu es un modèle pour moi et tu le resteras toujours. Ça me fait de la peine de te voir blessé. J’imagine que tu as vu des choses qui t’ont secoué. Mais ne baisse pas les bras, jamais, jamais… ».
Thibault est très ému. Les deux anciens co-équipiers se serrent longuement dans les bras l’un de l’autre. C’est beau et terriblement émouvant.
Soudain, je repense aux mots du beau pompier de la veille. Et je me dis que moi aussi, dans une autre vie, dans un autre monde, dans d’autres circonstances, j’aurais tellement aimé être plus que pote avec cet adorable garçon !
« Arrêtez un peu, les gars, avant de changer de bord » fait Thierry.
C’est lorsque leur accolade virile prend fin que Thibault fait l’annonce que j’ai d’une certaine façon attendue pendant toute la soirée.
« J’ai un truc à vous dire les gars… ».
« De quoi ? Tu vas te faire curé ? » plaisante Thierry.
« Je vais être papa… ».
« Sacré Thibault ! » fait le même Thierry en brisant le petit blanc amené par l’annonce du jeune pompier « félicitations mon grand ! ».
Tout le monde congratule le beau pompier, avec des bises, des accolades. Sur le coup, Jérém a l’air désarçonné par la nouvelle. Comme les autres, mais peut-être davantage encore que les autres. Mais il finit par féliciter Thibault à son tour.
Lorsque nous arrivons à Toulouse, il est près de 4 heures du mat. J’arrête la voiture en bas de chez Thibault et je laisse le volant à Thierry. Jérém, Thibault et moi descendons de la voiture. Thierry repart aussitôt, tout en nous lançant un adorable : « Je vous adore les gars ! Jamais on ne se perd de vue, ok ? ».
« Ok !!! »
Jérém et moi aidons Thibault à regagner son appart.
Plusieurs mois après notre nuit ensemble, nous nous retrouvons enfin tous les trois réunis. J’ai peur que maintenant que nous ne sommes plus que tous les trois il y ait comme une distance entre nous. Alors, je suis heureux d’entendre Thibault nous lancer :
« J’ai envie d’un café. Vous voulez un café les gars ? ».
« Je veux bien » fait Jérém.
« Moi aussi » je suis le mouvement.
Thibault entreprend de préparer la cafetière, mais il galère. Jérém le rejoint aussitôt pour l’aider. Thibault le regarde faire sans le quitter des yeux et finit par lui lancer, l’air ému :
« Merci, Jé, merci, merci, infiniment merci »
« T’emballe pas, c’est juste une cafetière » plaisante mon Jérém.
« Je ne parle pas de ça. Thierry m’a dit que c’était toi qui avais eu l’idée de cette soirée et qui avait tout organisé ».
« Ah, ça… c’est rien… ».
« Au contraire, c’est tout. Tu ne peux pas savoir comment ça m’a fait plaisir de vous revoir. Et de te revoir. Tu m’as beaucoup manqué ».
« Je suis désolé de de la façon dont les choses se sont passées » lance alors Jérém « je n’ai jamais voulu te faire du mal »
« Je sais, je sais » admet Thibault, faisant face à son meilleur pote.
« Si tu savais comment tu m’as manqué aussi, frérot » fait mon bobrun, en prenant son pote dans ses bras et en le serrant très fort contre lui.
« Et merde, tu vas encore me faire chialer » fait Thibault.
A ce moment précis, je suis tellement fier de mon Jérém. Ces retrouvailles entre meilleurs potes c’est tellement beau à voir !
« Akim a raison » fait Jérém « tu es un gars génial. A moi aussi tu m’as appris un tas de choses, mais avant tout tu m’as appris comment être un mec bien. Ton amitié compte énormément pour moi. C’est l’une des choses les plus précieuses que je possède. Tu as vécu des choses difficiles, mais tu vas t’en sortir. Je suis à Paris, mais tu pourras toujours compter sur moi. Ne baisse jamais les bras, jamais ».
« Toi aussi tu pourras toujours compter sur moi, mon pote ».
« Je le sais, je le sais ».
« Je suis content pour ce qui t’arrive. Avoir un enfant est une grande responsabilité et tu vas gérer ça comme un chef ».
« Je l’espère ».
« J’en suis convaincu ».
« Et merci à toi aussi, Nico » fait alors Thibault « parce que je suis certain que c’est toi qui as dit à Jé que j’étais pas bien ».
Je me contente de lui sourire, en essayant de retenir mes larmes.
« Toi aussi tu es un bon gars » il continue « et je suis content de vous voir heureux ensemble ».
Avant de quitter Thibault nous nous serrons tous les trois dans une étreinte virile qui fait battre fort mon cœur, de joie et de bonheur.
[Et puis, le lendemain, Nico débarque par surprise à ton appart, avec des potes à toi. Et ton Jéjé est parmi ces potes. Tu es si touché que tu en as les larmes aux yeux.
Une expédition à Albi est lancée pour aller retrouver Akim, un ancien coéquipier du rugby à Albi.
Ça te fait un bien fou de retrouver tes potes.
Et au retour sur Toulouse, le plus beau cadeau de la soirée, enfin les retrouvailles avec ton Jéjé.
Une soirée avec tes potes, les retrouvailles avec ton meilleur pote de toujours. Et tu as enfin retrouvé le moral].
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